Wave pictures : ne pas oublier les vieux amis
On a tendance à les oublier. Ces enregistreurs à répétition qui, bon an, mal an, publient toujours quelque chose. Cette bande de gars trop doués et pas suffisamment géniaux, trop peu attachés au marketing, pour avoir vraiment percé. Et ce n’est qu’à la cinquantième écoute de l’année qu’on s’aperçoit qu’on n’en a toujours pas parlé.
Alors que chaque sortie d’Adam Green, pourtant très économe de son génie supposé, trouve un écho critique, à l’autre bout de la galaxie « freak folk » ça s’agite dans l’ombre. On n’y prête plus attention, à ces disques des Wave pictures. On les a cru géniaux, et comme ils ne sont que super cool, on est repartis à la chasse au snark en sirotant une mousse.
Eh bien non. C’est mal. Il ne faut pas, faire comme si tous leurs disques se ressemblaient trop. Ils se ressemblent, oh oui, après tout ils ont un style à eux c’est déjà inespéré de nos jours.
Mais ils ne se ressemblent pas, pas au point de valoir l’un pour l’autre. Le cru 2009 était moyen, pas à la hauteur du 2008 (le splendide Instant coffee baby). La sortie 2010 est vraiment excellente, presque autant que le bijou d’il y a 2 ans (on vous épargne les premières années de leur discographie déjà touffue).
Cette année c’est plus rock (ce titre déjà, Susan rode the cyclone). Le chant de David Tattersall n’a pas bougé d’un iota, mais derrière la guitare et la rythmique est plus rock, plus épaisse. Dès Kittens, et ses paroles charmantes, on est dans un super disque.
Il y aura 2 ou 3 passages moins inspirés (I just want to be your friend, déjà fait 20 fois seuls ou avec Herman Düne), mais en 10 titres on n’aura pas le temps de s’ennuyer. La cavalcade de I shall be a ditchdigger, la ballade sirupeuse mais légère Sweetheart, préparent le moment le plus rock américain de la galette, Cinnamon baby, le genre de rock que tout fan des années 60 a eu envie un jour de savoir composer.
Ne les laissez pas faire. Ils avancent au petit trop, sans pub et sans fanfaronnade. Ah les cons ! Ils balancent l’air de rien leur disque annuel comme s’il s’agissait d’une banale formalité, une signature sur la feuille de présence. Quels idiots ! Ils nous laissent découvrir sans prévenir le solo de Throwing words visiblement inspiré par Tom Verlaine. Les lâches !
Throwing words
Revenez, mes chers crétins, la liste n’est pas finie. J’ai fini par comprendre que vous êtes montés à l’envers. Chez vous c’est la voix qui accompagne la guitare. Là où chez les folkeux les mains font la grève de l’imagination et laissent le chant se démerder quasiment seul, vous faites l’inverse. Deux-trois lignes de voix suffisent à tenir tout votre répertoire. Après tout, à la manière de Eddie Argos de Art Brut la voix n’est là que parce que les paroles ne se chanteront pas toutes seules.
Elles racontent des histoires touchantes ou grotesques, et les instruments transforment ces petits contes en magnifiques morceaux comme Susan rode the cyclone (à partir du solo à 1′44, on s’envole).
Cet album est vraiment un disque de guitaristes. Laissez couler les intros des morceaux, mélodiquement elles n’apportent pas grand-chose, elles posent seulement les bases pour ce qui suit, on ne se méfie pas et les basses de American boom entrent en scène. On peut même se demander si le fantasme des Wave pictures n’était pas de faire un disque composé uniquement de solos, jusqu’au moment où ils ont réalisé que sorti du contexte de la chanson, le solo n’en est plus un.
C’est que ce sont de doux rêveurs, les Wave pictures, du genre à souffler sur les bouteilles pour faire avancer les voiliers qui sont à l’intérieur.
Je les aime beaucoup mais j’avais laissé tombé après leur album de 2009… va falloir corriger ça !
il était décevant c’est vrai Pierre,
à force de sortir plein de disques le public ne suit plus, c’est le problème (idem pour stanley brinks)