Une nuit à la Cigale : Festival des Inrocks, 4 novembre 2010
Il y a surprise et surprise. Par exemple tu penses que tu auras à ton anniversaire le cadeau pour lequel tu as donné des dizaines d’indices à ta moitié depuis 1 mois. Et tu retrouves, surprise, avec un week-end en amoureux, sous la pluie et à une date qui pourrait difficilement moins t’arranger. Ah ah, les surprises c’est d’un drôle tout de même.
une soirée riche en surprises
Il y a les surprises du genre « John Grant il est chez Bella Union, donc ça doit être cool », sauf que… surprise ! Il y a les bonnes surprises, du genre « souvent le son est pourri dans cette salle pour le festival », sauf que ce soir… surprise :-) Et il y a les petites surprises sans en être, mais quand même un peu, mais pas trop, allez déballe ton cadeau quoi viiiiite. En bon habitué, on sait que les 4 noms imprimés sur la place de concert ne seront pas les seuls à fouler la scène. Le festival profite toujours de l’occasion pour confier un intermède à une petite formation. Ce fut Kennedy rappant comme un dingue il y a 3 ans. Ce fut Sing Sing (de Arlt) l’année suivante. L’an dernier, l’humoriste Jules Edouard Moustic s’y était fait pincer les fesses par une ambiance glaciale.
Tout le contraire de la surprise 2010. C’est Mai qui a été choisie, quel bonne idée, pour nous régaler. Surprise ! En duo avec Fred Fortuny, elle livre 3 titres gracieux, de son nouvel EP Silent seduction. Merci à eux deux et aux Inrocks pour ce choix applaudi chaleureusement (très) par une salle pleine.
Sans trop vouloir en rajouter, on ne s’attendait pas non plus à croiser autant de personnes qu’on connaisse, à partir de la vingtaine on se sent limite VIP, heureusement que la soirée fut assez longue pour mouiller quelques joues et serrer quelques paluches. Ces petits plaisirs ont leur revers : ça y est, ces gens qu’on méprisa si souvent, spectateur ordinaire, qui squattent le bar et discutant au lieu d’écouter sagement dans la fosse, on dirait bien qu’on en a rejoint le club. Gare, gare, la lassitude et la banalisation nous guettent, se pourrait-il que nous n’ayons plus d’autre plaisir à venir en concert que les verres qu’on y boit et les personnes avec qui on les vide ?
Nenni, et si on est devenu un plouc de plus, c’est un gros plouc enthousiaste qu’on revendique d’être. D’ailleurs on est arrivé à l’heure, car manquer 2 morceaux sur près de 4 heures de musique, c’est ce qu’on appelle arriver « tôt ». Une soirée Bella Union, label respecté et encensé des Fleet foxes, d’Emily Loizeau ou des Walkmen, bref un des labels indé les plus importants de ce jeune siècle, ça ne se rate pas.
Les fleurons de l’écurie Bella Union
On ne va pas prétendre être devenu fan de Midlake, auxquels il nous avait toujours paru manquer un “je ne sais quoi” (apparemment on reste minoritaire dans ce jugement), mais les quatre artistes programmés ont tous en commun d’avoir donné tout autre chose que ce qu’on connait d’eux sur disque.
Une plongée tête baissée dans les années 70 psyché, pour Midlake, pas très loin de Jethro Tull. De la puissance, beaucoup de puissance même, pas mal de générosité bien qu’ils ne soient pas expansifs, et on a vu combien est intacte l’aura de Jason Lytle de Grandaddy, qui partagea plusieurs titres avec ses hôtes. Cette plongée dans le temps fit même dire à Ska que Midlake avait chourré les clefs de la De Lorean de Doc et Marty ^^ Leur dentelle transformée en côte de maille leur va à merveille et ils font des étincelles, assurant le crescendo de la soirée.
Car tout a commencé en douceur, et en douceurs. Vous vous souvenez? Vous n’avez pas eu le temps de passer par le bar que la fin du premier morceau vous faisait montrer les marches ventre à terre (c’est une expression, ne faites jamais ça!). Il faut avouer qu’à écouter un peu trop de musique on se souvenait avoir entendu the Acorn, mais sans trop savoir ce qu’il en était ressorti.
Avec enfin un troisième album en poche ils se défendent très bien. C’est en se laissant aller au rock qu’ils sont le meilleur, quand les deux batteurs allient technique et puissance en soutenant la cadence. Après une attaque en douceur, the Acorn a laissé de côté sa timidité et réussi à chauffer la salle. On a à peine eu le temps d’avoir peur de s’ennuyer qu’ils haussent le ton et montrent ce dont ils sont capables. Autant dire que si les EP vous avaient laissés sceptiques, vous pouvez vous tourner vers No ghost sans hésitation.
On n’en dira pas autant de l’interlude de John Grant, qui traîna en longueur. A moins que, attendez… ah oui, il était bien prévu au programme en tant que concert. Ce doit être la venue de Moustic l’an dernier qui nous a induit en erreur, John Grant est donc bien musicien, et non pas une caricature barbue d’Elton John. Quel curieux concert en vérité. Il a failli nous charmer, Elton Grant, ou John Mercury, on ne sait plus trop. Par intermittence il nous touche, mais le reste du temps il évoque un pan des années 80, les ballades trop sucrées, qui réveillent nos caries. On dirait que de son album, Queen of Denmark, il a surtout retenu Queen, mais période Flash Gordon. Du moins nous aura-t-il donné l’occasion de nous extasier, une fois n’est pas coutume, sur la qualité du son, à laquelle le festival ne nous avait pas toujours habitué.
Beach house, c’est le nom qui nous a fait appuyer sur “ok” et qui nous rendait plutôt fier de pouvoir faire gagner des places pour la soirée, car cette année les Inrocks ont ouvert grand les bras aux blogs musicaux.
Quand on réécoute Silver soul, par exemple, on sent que la saturation de la guitare pourrait vite prendre le dessus avec un autre mix. C’est exactement le parti pris en live par le duo, devenu quatuor pour la scène. Une bonne partie du public a déjà entendu leurs chansons (pour preuve l’accueil triomphal fait à Used to be ou 10 mile stereo), et sous la masse sonore savoure ses titres préférés. Le meilleur des deux albums défile, avec la voix de Victoria quasiment seule devant, ce qui nous ravit mais change radicalement de Teen dream où on l’entend assez peu. Ceux qui connaissent Saltwater, du premier album, voient très bien l’ambiance dans laquelle baigna le concert.
La langueur des titres est compensée par des arrangements musclés, qui soulignent involontairement les similitudes entre certains titres. Certains le regrettent, mais nous nous sommes laissés porter de bout en bout!
Un peu émoussé, un peu saturé de son, on s’extrait un peu de Midlake pour rester nimbé dans le doux cocon de Beach house. Et on réalise qu’on a passé une de nos meilleures soirées Inrocks à la Cigale.
Beach house sera à Dijon le 17, et nous serons, comme tous les ans, au prochain festival des Inrocks ;-)
merci à Abi et Claudine pour la soirée, et au Transistor pour les photos
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Mon plus gros regret de la soirée : n’avoir pas osé lâcher les bonnes places assises que j’avais dégotées pour te rejoindre pour quelques pintes au bar… ;-)
On se rattrapera ailleurs.
(places assises oui, car je vieillis, nom d’une pipe !)
on voit un peu moins mais il y a souvent de bons sièges derrière la console en bas :-)
ce n’est que partie remise !
Je suis impatient de voir BEACH HOUSE mercredi : ton CR confirme leur bonne réputation live (j’avais déjà pu le constater sur quelques vidéos ; leurs albums m’ennuient assez par contre…)
je suis curieux de voir ce que tu en diras JP :-)
c’est pas le contrepied total mais c’est tout de même très éloigné de leurs disques oui
Eh bien, j’en dis exactement la même chose que toi ! Ce à quoi je m’attendais (du moins l’espérais-je…) Y a un “plus” indéniable sur scène, ils assurent vraiment ! Par contre, faut connaître le répertoire pour bien apprécier (et distinguer) les titres. Seul bémol : c’était trop court ! (à peine une heure de concert…) Et j’aurais aimé qu’ils jouent “Tokyo Witch” -du 1er album-, le titre avec lequel je les ai découverts (à l’époque je croyais que c’était un morceau de Damon & Naomi !)