arbobo

Tropicalia

Le tropicalisme est une pratique qui consiste à aller passer des vacances au club med grâce aux tarifs du comité d’entreprise.

Si si. Vous ne me croyez pas? Quoi? Un mouvement musical ET politique? Vous êtes sûrs? Vous croyez que je vais gober un truc pareil?

Alors la belle autobiographie de Caetano Veloso que je viens d’acheter, Pop tropicale et révolution, n’a rien d’une fiction?

On retient habituellement du Brésil sa samba bouillonnante, qui secoue les strings au festival de Rio. Au encore la bossa nova, rétro façon Stan Getz-Gilberto, ou réactualisée façon Henri Salvador ou Nouvelle Vague. Mais en deça des frontières, le pays a été marqué tout autant sinon plus par le courant tropicaliste. Paradoxalement, le tropicalisme, qui a joué un rôle majeur dans l’histoire du pays, s’abreuve principalement au rock et à la pop anglo-américaines et non aux musiques locales. Les tropicaliste ont directement puisé leur inspiration révolutionnaire chez les Beatles (sic). Quelle ironie, pour ces super-stars dont qui se sont produites devant la reine d’Angleterre.

Je parlerai une autre fois de l’autobiographie de Veloso, que je commence à peine. Comme il se doit, j’ai acheté la compil Tropicalia là où j’achète la plupart de mes disques édités par Soul-jazz : à L’Oeil du silence. Le livret est évidemment excellent, on est rarement déçu par ce label, et l’iconographie est de qualité.

En 1964, les militaires prennent le pouvoir au Brésil par un coup d’état. Dans les années qui suivent,  Veloso raconte qu’il avait l’impression que l’ensemble du monde de la culture et ds artistes du pays était solidement ancré à gauche, dans l’opposition. Le Tropicalisme, mouvement animé principalement par Caetano Veloso et Gilberto Gil, dura 1 an. Des nombreux mouvements de protestation qui ont éclaté ou culminé en 1968, le tropicalisme est rarement mentionné. Il valut tout de même à ses leaders l’emprisonnement et l’exil. Impossible de dissocier le tropicalisme de sa dimension politique. La pochette du disque reprend un slogan, “é proibido proibir”, qui souligne encore la dimension mondiale des soulèvements de cette année.

Aujourd’hui la boucle est bouclée, puique Gilberto Gil a été ministre de la culture du gouvernement brésilien, couronnant un parcours qui n’a cessé d’être politique et militant. Le Brésil n’est d’ailleurs qu’un des nombreux exxemples de révolution soutenue par la chanson, particulièrement en Amérique latine. Dans les années 80, une troupe mexicaine a fait une tournée mondiale avec une comédie musicale racontant l’histoire de leur communauté. L’un des titres de ce Teatro campesino (le théâtre campagnard) était Viva la huelga en general (vive la grève générale). J’ai toujours été un peu surpris que mes sages parents me fassent écouter ça.

Le Tropicalisme rassemblait des artistes divers, poètes, gens de théâtre, peintres, et ne se limitait pas à la musique. Musicalement, les tropicalistes ne sont pas très nombreux : Veloso, G Gil, O Mutantes, Tom Zé, Gal Costa. Mais leur réseau s’étendait au-delà de ce petit groupe et on peut aussi nommer de artistes proches d’eux sans qu’ils soient eux-mêmes tropicalistes. Typiquement, Maria Bethania, soeur de Caetano Veloso et immense chanteuse de bossa, appartient à ce deuxième cercle, dans lequel on croise aussi Jorge Ben.

On connait plus Veloso aujourd’hui pour sa reprise de cucurrucucu (grâce à Almodovar), que pour tropicalia. Mais les 2 valent le coup. tout comme on connait surtout Gilberto Gil pour son tube toda menina baiana. Alors que c’est bat macumba qui fut l’un de ses titres tropicalistes (par lequel s’ouvre la compil de soul jazz, d’ailleurs).