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Sophie Hunger, 1983 raisons de l’aimer

par arbobo | imprimer | 11avr 2010

C’est la déroute. Avec son magnétisme elle a déréglé nos boussoles et autres instruments de bord. Cap incertain. Paysage incertain. Et du mal à se repérer.

On se souvient de Monday’s ghost, et combien Sophie Hunger nous avait bluffé avec certains morceaux, comment elle avait su faire sonner la langue allemande comme personne. On a également en tête un beau concert où sa science des arrangements et son aisance vocale faisaient des merveilles. Un concert très jazzy, comme ce nouvel album. Contrebasse bien ronde, piano, trombone, les arrangements et la production tirent le tout vers un douceur certaine.

Cette douceur, mesurez le paradoxe, c’est ce qu’on regrette un peu. La facilité de Sophie Hunger est déconcertante mais on aimerait qu’elle se jette parfois à corps perdu, qu’elle se départisse de sa retenue. On trouve ça dommage et en même temps c’est le petit coup de génie, ce dosage d’apéro, qui permet de tenir toute la soirée sans s’effondrer. Cette douceur formelle, c’est justement ce qui rend accessible à tout public, immédiatement, Lovesong to everyone, un titre pourtant conçu au départ comme un croisement entre du krautrock répétitif et du Velvet underground. On est séduit et frustré, on est déjà pris mais on persiste à attendre plus de la suissesse.
Sophie Hunger, qui es-tu? Le loup dans la bergerie, ou au contraire une Lou Reed avec un t-shirt hello kitty? De ne pas savoir, c’est ce qui est brillant, et dans le même temps c’est ce qui empêche d’être totalement conquis. Parce qu’il y a eu ce premier album, qui montrait des signes d’audaces aujourd’hui domestiqués.

Disons aussi clairement que certains morceaux sont flemmards malgré leur belle exécution, Headlights, Broken English, sont assez soporifiques (et cet horrible harmonica, par dessus le marché, pouah). Et même ce Train people final, c’est pas des manières de nous terminer l’album en roue libre et en pente douce! Des promesses, des promesses, et puis au final la rase campagne. C’est pas joli ça madame, de nous faire ce coup là.
Surtout qu’avec une telle souplesse vocale et un tel timbre il n’en faut pas beaucoup pour qu’on suive, alors on y revient, à ce léger manque d’engagement, ce manque de vitamines et d’énergie sur la longueur de l’album.
La frustration, encore, encore…

Et qu’elles sont belles les promesses, la reprise de Noir désir nous met les poils, Your personal religion pourrait être sur un album de notre adorée Laetitia Sheriff, Citylights forever s’invite dans nos rêves, et Invisible prouve que Sophie Hunger peut se mettre au r’n'b quand elle veut.
Voilà, on réécoute et on passe chaque fois par les mêmes montagnes russes, les mêmes hauts, les mêmes bas, on réalise que Hunger est un peu une Camille suisse, qui aurait beaucoup écouté Sade en famille et le Velvet en cachette. Or c’est dans le rock qu’elle reste la meilleure, sa douceur y fait des merveilles dans ce flot d’énergie car elle ajoute du contraste, un brin de piment. Tandis que plus les morceaux sont doux et plus le ton sur ton vire au décoratif.

Deux albums pour Sophie Hunger, et déjà un bonne dose de morceaux magnifiques, qui de plus nous ont fait aimer la langue allemande (1983). On l’aime et on continue à fantasmer sur ce qu’elle donnera un jour, par surprise, quand elle passera en mode Nina Hagen. Comme elle le fait sur cette inquiétante photo de pochette où elle mime la mort avec conviction.

Citylight Forever from Citylights on Vimeo.



Comments

7 Commentaires


  1. 1 Thierry on avril 11, 2010 13:50

    Je dois avouer, même pas honteusement, ne pas avoir tenu très longtemps à l’écoute de cet album. J’aime pas Camille, de toutes façons ! La chanteuse, pas ma fille ^^

  2. 2 arbobo on avril 11, 2010 17:36

    je suis pas très surpris,
    cela dit quand je parle de Camille c’est un apport assez lointain :-)

  3. 3 Benjamin F on avril 12, 2010 9:30

    Comme Thierry, perso je me suis arrêté à l’écoute de la reprise de Noir Désir. Tout ça ne m’a pas trop excité :)

  4. 4 arbobo on avril 12, 2010 13:02

    je la trouve assez énorme cette reprise, déjà sur scène elle m’avait fait frissonner

  5. 5 GT on avril 15, 2010 18:57

    Il y a 2-3 morceaux pas mal sur cet album, comme Citylights forever, 1983, Your personal religion (qui sont aussi parmi tes titres favoris, on se rejoint au moins là-dessus… mais pas sur le Vent nous portera, qui m’a plutôt gonflé…) et ça ne t’étonnera pas trop non plus, je pense, si je te dis que comme Thierry et Benjamin F, je n’ai pas trop accroché à l’album et que je l’ai trouvé un peu trop soporifique et lisse…

  6. 6 arbobo on avril 15, 2010 19:02

    oui c’est l’ambiguité de ses choix, et l’envie que j’ai qu’elle se lâche plus
    pourtant Lovesong aurait pu être un bon gros zinzin krautrock, il s’en faut de peu!

  7. 7 Alex (le Yéti) on avril 24, 2010 18:22

    Je suis d’accord avec Arbobo: le reprise de Noir Desir est magnifique.
    J’avais aussi tous mes poils (nombreux) dressés partout.

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