soniques eighties à la Villette : Goblin, Liquid Liquid
Tout gobelin, plongé dans un liquide, en ressort comme au jour de sa naissance.
C’est… même pas vrai.
C’était un peu plus compliqué que ça, ce 29 mai. Villette sonique est décidément un festival de haute volée et surprenant. Un festival qui se plait à mélanger les genres mais aussi les époques.
Au lendemain du concert de Liars, on a pu profiter dans l’immense salle Charlie Parker de deux mastodontes sans grand rapport.
D’abord le groupe italien Goblin, qui à l’exception de deux titres de leur nouvel album sont venus interpréter des extraits de leurs bandes originales des films d’horreur de Romero (Zombie) et Dario Argento (Tenebre, Profondo rosso, Suspiria…), dont des montages défilent en fond de scène.
Souvent un groupe compose pour un film un album complet, dont seulement deux ou trois titres sont réellement utilisés dans le film (une petite moitié de l’album dans le cas de Air pour Virgin suicides). On comprend mieux pourquoi après une grosse heure de concert chiche en morceaux de bravoure. Le thème de Tenebre (samplé par Justice), celui de Zombie, soulèvent la partie de la foule la plus cinéphile. De très bons morceaux, quoique parfois un peu interminables, noyés dans un océan médiocre de plouquitude.
On aurait du avoir la puce à l’oreille en voyant à la guitare un cousin empesé de Santana et Robert Charlebois. Certains titres 70s ont assez de groove et sont assez serrés pour tenir la route. Pour le reste, entre 2 génériques “culte” (le thème de Suspiria ravit toujours ceux qui connaissent le film), on fait la queue au bar : “une pinte de Prozac s’il vous plait”. Comparé à la musique de Goblin, on réalise combien les films d’Argento n’ont pas si mal vieilli ;-) Au milieu de la scène, un Rahan version big-mac nous joue une musique qui rallume le capitaine flamme qui est en toi. On espère qu’ils ne feront pas la rediff intégrale, mais plus l’heure avance et plus on a l’impression d’être au festival RTL2-le-son-pop-rock sur l’aire d’autoroute Daniel Guichard.
C’est le moment qu’ls choisissent pour balancer le thème de Profondo rosso. Enorme. Saignant. C’est tout le problème de Goblin, ils ne sont jamais aussi bons que lorqu’lis flirtent avec la limite. L’inconvénient étant qu’avec des pataugas taille 48 tu croques vite sur la ligne. Le stand merchandising annonce une promo sur les perceuses pour ceux qui en ont marre de leurs tympans.
Dans les films d’Argento les personnages agaçants sont tués beaucoup plus tôt, il aurait détesté ce concert.
Il est déjà minuit lorsque les new yorkais Liquid Liquid débutent. Associés à ce qu’on appelle la “no wave” New Yorkaise, réédités récemment, leurs titres sont recroquevillés sur une période assez courte autour de 1980.
On y trouve le minimalisme de Suicide, et l’ouverture afro-cubaine des Talking heads, voisinages auxquels on revient systématiquement mais qui sont bien réels.
L’équation de Liquid liquid est assez simple : une ligne de basse (celle, énorme et imparable, de Cavern, est inoubliable), des paroles scandées comme on balancerait des riffs, et du rythme. Des rythmes, au pluriels, percussifs, hypnotiques, dansants, répétitifs.
J’ai dansé jusqu’aux crampes, mais en reprenant du souffle sur les places assises, focalisé sur l’écoute on peine déjà plus. Difficile d’apprécier un tel groupe sur scène sans se laisser emporter par la danse. On reste à l’écart de la transe, on écoute avec ses oreilles au lieu de laisser faire tout son corps.
Les morceaux de Liquid liquid sont arides, secs comme les cow-bells, claves et autres percussions avec lesquels ils nous embarquent. Leur groove est paradoxalement dur comme le fer, industriel. Minimaliste, et en cela très éloignés du lyrisme de Talking heads. Ici pas un gramme de pop, un vrai quatre-quarts : un quart de rythme, un quart de rythme, un quart de rythme, et pour lier le tout, un quart de rythme.
Pourtant l’expérience vaut le coup et le groupe n’a rien perdu de son savoir faire. Epuisant, édifiant aussi par son jusqu’au boutisme.
Une soirée des antipodes musicales. La lourdeur pataude d’un groupe qui doit son succès aux admirateurs de films de genre, puis l’intransigeance de papes du rythme. Entre les deux, une belle surprise dont je vous parlerai plus exclusivement.
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Ouais, les Goblins… Un grand moment de régression mais aussi de lourds accès d’une ringardise parfois pénible (les solos interminables)… Le plus drôle fut le public qu’ils drainèrent en partie et qui n’était pas du tout de ceux qui fréquentaient le pointu Villette sonique les autres jours… D’ailleurs, ces lourdauds biberonnés au gore et à la prose médiocre de Mad Movies ont dû fuir à l’arrivée du second groupe, cette tuerie sonique et esthétique. :-)
Et puis un gros bémol tout de même concernant la prestation des Goblin : l’absence de Claudio Simonetti. Il y a dû avoir une scission dans le groupe car je l’ai vu annoncé à l’affiche d’un festival à Turin avec ciné-concert sur Profondo Rosso cet été. Et je crois bien, quand même, que l’âme des Goblin, c’était lui…
Reste le plaisir énorme à entendre live les thèmes de films aussi géniaux que Suspiria, Ténèbres ou Profondo Rosso…
Sinon, c’est vrai qu’on se croyait vraiment dans Spinal Tap par moments… :-/
Sur Liquid Liquid, j’avoue que le quatre quart rythmique (bien vue, la formule) m’a complètement laissé sur la touche. Peut-être aurais-je dû aller danser, comme toi, mais, bon, ça ne m’accrochait pas assez pour que je me lève…
Beau festival sinon, chouette lieu. Et puis le mercredi, deux jours avant, une vraie baffe avec le concert cataclysmique de Jesus Lizard…
Ça me rappelle les concerts amateurs dijonnais, je sais pas pourquoi.
l’aire de stationnement daniel guichard, peut-être?
;-)