Monstre cosmic : Monade s’envole
Depuis les Bedroom recordings débutés en 1996, Monade est sortie de sa chambre et conquiert maintenant le cosmos. Avant d’écouter Laetita Sadier vous parler de sa musique (c’est ici, avec le podcast), penchons-nous sur Monstre cosmic.
Vendredi 15 février, j’ai ma place depuis 3 mois, je vais découvrir Monade sur scène au Divan du Monde. Depuis son 2e disque, Laetitia Sadier n’est plus en solo, elle s’est entourée d’un groupe, au line up inchangé, depuis qu’elle s’est installée à Bordeaux. On croise d’ailleurs beaucoup de monde sur ce disque, notamment Rachel Ortas au chant et aux illustrations.
La tête chantante des très anglais Stereolab est devenue la tête tout court d’un groupe entièrement français. Mais à l’oreille, cela ne s’entend pas nécessairement, la trace la plus visible de ce
déménagement est qu’une majorité des titres de Monstre cosmic est chantée en français, alors qu’ils étaient minoritaires chez les londoniens. L’univers sonore, lui, n’a rien de la ”chanson française”, c’est la pop qui y règne.
Modeste en interview comme sur scène, Laetitia Sadier s’est placée sur le côté, laissant l’excellente bassiste Marie Merlet occuper le centre de notre attention, et une partie du chant. Mais la voix de Laetitia, reconnaissable entre toutes, nous captive rapidement.
Après la jeune et déjà excellente Marie-Flore en première partie, puis les Koko von Napoo meilleurs que jamais, Monade a pris la scène pour jouer des morceaux tirés principalement du nouvel album.
Et ça tombe bien, car ce disque est superbe. Après le minimalisme et le charme de Socialisme ou barbarie, j’avais presque été déçu par le deuxième Monade, ses morceaux sont très bons mais il me manquait une touche de nouveauté, un je-ne-sais-quoi (comme disent les anglais). Monstre cosmic ouvre de nouveaux espaces. Avec brio.
Le son, la production, frappent d’emblée par leur qualité, leur profondeur. Très vite on sent que les années 90 et même 80, le côté électro et dépouillé qui pouvaient créer une proximité avec Stereolab, sont totalement absents ici. De même, la mélodie a pris le pas sur la dimension cyclique, et la partie pop l’a emportée sur la composante rock. Autant dire que la différence est grande, même si la proximité sonore des deux groupes peut transparaître par moments.
Le son et les orchestrations très organiques, la basse très seventies et très en avant (pour mon plus grand plaisir), contribuent à une atmosphère riche, très cinématographique. Elle topo, par exemple, nous emmène immédiatement dans l’évocation très visuelle d’un vieux film.
Ce sentiment est conforté par les paroles de Laetitia Sadier, que l’on découvre douée pour le récit alors qu’on l’a connue dans des formes plus suggestives. En prêtant l’oreille aux paroles, on est saisi d’angoisse par Etoile, avant d’être emporté, de titre en titre, par un sens du rythme subtil et surprenant.
L’écrin sonore est léger, caressant, mais le contenu complexe et pas toujours sage. Ce disque vit sa vie, il n’est pas d’un bloc.
Manifestement, le songwriting de Laetitia Sadier a pris de l’ampleur. Musicalement, vocalement, elle ne cesse de s’améliorer, se bonifier. Elle qui fut l’icône underground des années 90, témoigne une envie constante de s’améliorer au lieu de gérer une image de figure indé. Enfin en pleine confiance, elle tente plus et réussit tout.
Meilleur disque de Monade à ce jour, Monstre cosmic est peut-être même celui (sacrilège !) qui pourrait faire de l’ombre à l’intouchable figure de Stereolab.
Prenez place, en route pour des rêves monstrueusement cosmiques.
Tweet