L’Olympia des Inrocks 09 : I saw a light
Dès mardi 3 le festival des Inrocks 2009 a débuté, apportant aux uns la confirmation, à d’autres la surprise, bonne ou mauvaise. Dernier rebondissement, l’annulation pour raison médicale de La Roux, remplacée par Two door cinema club, à Paris Samedi et sur les dates suivantes.
On vous reparlera de la soirée de dimanche, mais pour l’instant on brûle de vous raconter par le menu une nuit à l’Olympia !
Olympiade
Les lettres de feu sur la façade, un petit évènement en soi, qui toutes et tous, sans concertation, nous fait stopper sur le trottoir pour une photo souvenir.
On voit passer de jeunes brunes aux cheveux cernés à la manière de Natasha Khan. Puis un public plus âgé qui pourrait bien se révéler plus attiré par Barney Sumner.
Puis c’est la plongée. Ce long, interminable corridor conduisant sur un atrium évoquant une croisière pharaonique. Orgie de rouge, ambiance électrique de film de Dario Argento, on est parti pour un massacre ou un sortilège. On aura les deux.
The Wave machines
Si par vagues ils entendent qu’on ondule les corps à leur écoute, ils ont tapé juste.
Leur pop un poil disco, assez groovy, finit avec appétit les assiettes de Mika et de Jamiroquai. Tout en midtempo, Keep the lights on provoque des déhanchements un brin lubriques.
Portant des masques sans qu’on sache trop pourquoi (l’effet est un peu cheap, mais pas gênant), ils balancent bien, avec d’autant plus de mérite que la salle ne se garnit que très lentement. Avec un son bien en place, une basse très en avant, ils lancent bien la soirée, avec une belle énergie. Et terminent sur un rock bien british, comme pour faire la transition avec leurs successeurs.
Mais Violens va intriguer, commencer à séduire, puis nous laisser sur la réserve.
Le problème de Violens, si on peut oser de parler de problème, c’est qu’ils sont typiques de cette génération cultivée de fils respectueux, un peu trop respectueux de l’héritage qu’on leur a laissé.
Trop cultivés, franchement, au point de nous emmener tantôt du côté de Talk Talk (le début du concert est vraiment excellent), pour ensuite donner dans les montées lyriques à la Shearwater, puis la pop emballée à la Smiths, qu’ils maitrisent parfaitement. On se demande si un petit débat sur l’identité musicale ne leur ferait pas du bien?
Car écrire des chansons, ils font ça très bien. Le son se dégrade en cours de route, mais ils n’y peuvent rien. Le batteur a un sens du rythme assez particulier, et ne devient vraiment bon que sur les titres au bord de la syncope, à l’anglaise.
On sort de ce parcours fléché dans les 80s sans s’être ennuyé mais pas convaincu non plus. Un peu d’audace, les gars, c’est ce qu’il va vous falloir vu les ambitions que vous affichez.
L’audace, elle peut consister à renoncer à la légende pour s’entourer de jeunots dans Bad lieutenant. Barney Sumner est dans les livres d’histoire, aux chapitres Joy Division et New Order. Mais ce soir il la joue curriculum vitae détaillé. Son groupe manque de finesse, et bourrine même salement le Dreams never end final, qu’ils auront du moins eu le mérite de faire durer plus de 7 minutes. Largement le temps de nous faire regretter l’originale, tout en nous procurant un plaisir coupable. Temptation et Crystal s’en sortent avec moins de bleus dans les pattes.
Bad lieutenant nous aura servi des titres de leur album, mais aussi l’excellent Out of control chanté par Sumner chez les Chemical brothers, et… un titre d’Electronic. Rappel de la plus grosse faute de goût de sa carrière, si l’on excepte les passages en force de ce soir. Rien de honteux, mais on a une impression de remake. Comme lorsque Bowie, de toute façon en panne d’inspiration, est allé se trouver des tâcherons métalleux pour s’amuser avec Tin machine.
Sumner se fait plaisir, et nous aura régalé de quelques bons moments. Il en faudra plus pour ajouter un chapitre à la légende. Mais c’est juste ce qu’il faut pour entretenir la connivence avec les fans de New order, venus nombreux ce soir.
Two suns shining high
Un ancien Joy Division et New Order passer en avant-dernier au lieu d’être tête d’affiche, c’est tout un symbole. Les temps changent. Mais Natasha Khan n’a pas usurpé la place qui lui est réservée ce soir. Bat for lashes va nous offrir l’un de ses plus beaux concerts, et nous envoyer dinguer dans les étoiles.
Au réveil il y a avait deux soleils. Deux comme les albums de Bat for lashes. Deux comme les soleils de Tatooine. Natasha Khan, elle, est unique.
Déjà splendide au Bataclan, elle a su nous emporter ce soir dès les premières notes. C’était une vertu de sa première tournée, cette atmosphère qui ne vous laisse pas le temps de vous demander où vous avez mis le pied. Perfectionniste comme on en fait peu, Natasha a travaillé d’arrache pied pour faire que chaque concert soit plus abouti que le précédent. On en voit ici la version finale, un véritable aboutissement avant de repartir en Amérique latine dans 3 mois.
Atmosphère envoutante, morceaux plus finis que jamais et plus variés aussi. Le groupe fonctionne à merveille, et l’on plaint les sud-américains qui verront une formation à la batteuse renouvelée. On voit mal comment trouver aussi bonne que Sarah Jones, une véritable merveille de puissance, de toucher, de finesse, d’à propos. Elle et Natasha donnent tant de force à ce show qu’on oublierait presque l’apport décisif de Greg Weeks et de l’admirable Charlotte Hatherley.
Le concert mélange le meilleur des deux album, avec une cohérence et une unité qu’on ne leur devinait pas. A Tahiti succède Siren song, puis Trophy, apportant la preuve d’une maturité impressionnante. Bat for lashes ne nous a pas eu au bluff, elle nous pénètre avec une sincérité et un talent qui font frissonner la salle.
Sans temps mort, Bat for lashes nous prend dans sa main et ne nous lâche plus. Nous attire dans des endroits magiques, nous fait vibrer. A la fois organique (oh, ces handclaps dosés à la perfection!), avec l’apport de deux violons, et plus électronique que précédemment. Two planets réalise ce mix parfait de basses charnelles et d’aigus plus électro. Au milieu, reine de la soirée, Natasha. On la savait fée, elle se révèle sorcière. On la connaissait shamane dialoguant avec les éléments, voilà qu’elle fait parler les machines.
La jeune femme timide qu’on a connue au Nouveau Casino a achevé sa mue. Leader charismatique, généreuse sans en faire trop, et plus en voix que jamais. Une voix qui nous parcourt la peau et nous fait des trucs insensés. Comme elle l’avait annoncé il y a longtemps, les rythmes ont la part belle, permettant à Sarah Jones de rayonner comme sur Two planets.
La blondeur a un mot pour la désigner, la bruneur a Natasha. Même le duo avec Scott Walker, the big sleep, passe à merveille, chanté en duo virtuel avec son alter ego, cette anti-Natasha blonde, Pearl, qui lui répond depuis l’écran. Remanié de fond en comble et donnant une belle place à la guitare de Hatherley, le morceau illumine les rappels. Natasha nous en donne encore et encore, avec un inédit puis un final de choix, Priscella, à l’autoharpe.
Idéalement débutée, cette soirée chargée nous aura laissé sonnés. Béats.
Heureux.
Vraiment sympa et complet ce Live Report (même si ça me fait toujours un petit pincement au coeur d’en lire)
je vois ce que tu veux dire,
et chaque fois que je mets mes bouchons d’oreille c’est avec une petite pointe d’angoisse.
mais il y a tant de manière d’apprécier la musique :-)
ah zut, mon com était pas passé. J’ai beaucoup aimé ce billet, plus que d’autres. Emotion et écriture, et puis ce format long, que je préfère, malheureusement pour l’auteur ^^
Le Bataclan m’avait un peu laissé la réserve. Mais là c’est vrai qu’on a retrouvé une grande Bat for Lashes.
Une harmonie et une cohésion du groupe qui m’avaient manqué la dernière fois
on est donc d’accord :-)
et merci christophe, c’est le genre de “pression” dont je veux bien tous les jours tant elle ressemble à un compliment ;-)