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Topic: transversales
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Les disques d’interprètes

par arbobo | imprimer | 5avr 2010

C’est le printemps, c’est la nouvelle star, et opportunément sort l’album de celle qui m’a bluffé l’an passé, Camélia Jordana, 17 printemps tout mouillés.

C’est chaque fois pareil. Je regarde la Nouvelle st*r, parfois même je vote, ça m’amuse, parfois je m’enthousiasme. Puis le disque sort, dès le single je n’arrive pas à me tenir éveillé jusqu’au bout. Je m’ennuie. Je m’emmerde. Je trouve ça plat.
Oh, il est pas mal du tout ce Camélia Jordana, on l’a écouté jusqu’au bout,  Moi c’est est un beau morceau (de Mathieu Boogaerts!), et elle donne de Lettera une version très touchante 4 ans après celle de Babx. Quoiqu’à la longue tout ça se révèle court en bouche, et un peu trop “à la manière de” (ce Je pars qui sent son vieux Ferré alors qu’elle a 17 piges…), ça reste un disque très honnête voire plus que ça.


Moi c’est

Mais hors des cas particuliers comme la bonne surprise CJ, pourquoi est-ce que « ça ne marche pas » ? Sans doute parce que je ne suis pas très “chanson”, ok. Et puis, parce que je suis plutôt accro aux auteurs-compositeurs interprètes, les singer-songwriters comme ils disent. Ou les groupes, mais ça revient un peu au même en version collective. Pourtant… je vante souvent des reprises et notamment des disques qui leurs sont consacrés, comme récemment celui de Joan as police woman.
Les chanteurs de jazz n’ont pourtant pas ce problème. Nul ne contestait à Billie Holliday que Strange fruit était “sa” chanson alors qu’elle n’en n’en avait pas écrit une ligne, de même qu’Ella Fitzgerald ou Nina Simone furent d’immenses interprètes. Le jazz est quasi unique en son genre tant l’interprétation et la réappropriation y sont centrales. Laissons-le donc de côté.

Alors ? Alors je m’interroge, est-ce vraiment le côté « interprète » qui me laisse sur ma faim ? En un sens oui, car pour une Camélia Jordana qui apporte son joli grain de voix, une Joan Wasser ou une Cat Power conçoivent de a à z leurs reprises, de l’esprit jusqu’aux arrangements et même la production. Et lorsque Buzy, pour une fois, abandonne 2 titres de son album à d’autres mains, elle est tout de même co-réalisatrice du disque, ce qui n’est pas rien.
Il me revient des moments d’outrecuidance adolescente où je me présentai à des castings pour chanter dans de petits groupes, bravache mais vite éconduit. Chanter ce n’est pas rien, il faut technique et talent, et j’accorde tant d’importance au chant que souvent c’est ce qui peut me détourner de disques aimés par d’autres (comme Ramblin’ Jack Elliott l’an dernier).

Alors quel est le problème (« mon » problème en tout cas) avec les disques d’interprètes ?
Suis-je bête, ce sont les morceaux, évidemment. Durant la nouvelle st*r, les chanteurs en herbe revisitent avec plus ou moins de réussite des morceaux généralement bons, parfois même des chefs d’œuvre. Quand leur disque solo paraît, généralement un coup d’œil rapide aux signatures des titres expliquent le peu d’intérêt qu’on y a trouvé. Toujours les mêmes noms, toujours la même marge de sécurité et le savoir-faire calibré radio dénué d’imagination. Cela vaut pour les jeunots aussi bien que pour notre Johnny national, qui n’a plus depuis longtemps de titre de la teneur de l’idole des jeunes.

Quand on nous annonce Daran ou Mathieu Boogaerts, voilà qui relève déjà le niveau. Mais les interprètes souffrent inévitablement de ce problème, ils doivent partager leurs auteurs, leurs compositeurs, qui parfois sont aussi interprètes. Comme la subtile Keren Ann qu’on croise au détour de pas mal de disques, dont celui de la renaissance méritée d’Henri Salvador. D’où l’impression, fondée, d’avoir déjà entendu ça quelque part, d’une proximité avec tel chanteur ou telle chanteuse, qui ont tout bonnement fait appel aux mêmes mains expertes.
Et puis ces disques d’interprètes, ils sont souvent commandités par des majors dans le but de séduire les radios, et par “séduire” on entend évidemment les rassurer. Donc rien qui dépasse, un son nickel mais pâlichon, une prod ni trop chaude ni trop froide, ni trop salée ni pas assez, de la vraie nourriture d’avion.

Il est plus difficile de s’approprier la chanson d’un autre, surtout si le morceau n’a pas déjà un vécu, comme c’est le cas des reprises. La reprise est déjà une relecture, peut apporter beaucoup à l’original, mais créer un morceau auquel on n’a pas participé… Idem pour l’auteur-compositeur, qui s’arrête souvent à mi-chemin de soi-même et de l’interprète. Il faut éloigner de soi ce qu’on écrit, mais pour le coller à la peau de l’autre il faut une intimité rarement créée. Il semble que les grands binômes compositeur-auteur/interprète se sont construits sur la durée, comme Gérard Jouannest et Juliette Gréco, Jean Fauque et Alain Bashung…

Peut-être le vrai talent est-il rare, tout simplement. Aussi bien chez les interprètes que chez les auteurs-compositeurs. Ou peut-être ne suis-je décidément qu’un mauvais coucheur qui n’aime pas les disques d’interprètes.



Comments

12 Commentaires


  1. 1 Christophe on avril 5, 2010 9:01

    Sinatra se mêlait de TOUT ! et pourtant il n’écrivait rien (pour plusser ton billet)

  2. 2 mmarsupilami on avril 5, 2010 9:45

    C’est peut être aussi parce qu’elle ressemble à l’institutrice de quand on était petit?
    Non?
    Ce ne serait pas freudien? Ni même froebelien?
    Ah bon!
    Je donne ma langue au chat, alors!
    :-)

  3. 3 arbobo on avril 5, 2010 10:11

    tu tiens le bon bout mmarsu ^^

    et en effet christophe, nous sommes parfaitement d’accord

  4. 4 mmarsupilami on avril 5, 2010 10:25

    Pour être sérieux, j’ajouterais que tu ne fais même pas allusion au genre où la scission entre “compositeur-créateur” et “interprète” est la plus phénoménale et abyssale. Je pense, bien entendu, à la musique classique. Certainement que des connaisseurs me détromperont car le classique m’est absolument et totalement inconnu, mais là, la partition étant la partition, tout au plus l’interprète apporte de la technique. Et un supplément d’âme quand la technique est tellement au point qu’il la dépasse? Je ne sais pas…
    C’était pour faire avancer le schmilblickx…
    ;-)

  5. 5 arbobo on avril 5, 2010 10:39

    c’est encore autre chose en effet, j’ai évité le classique même si les différences d’interprétation vont plus loin que ça tout de même, certains ont réussi à illuminer des oeuvres peu réputées, d’autres au contraire à empâter les plus belles compositions.

    le jazz a tout de même plus de connexions avec les univers rock, chansons, etc, les jazzeux ont souvent repris les Beatles, “les feuilles mortes” sont des prévert et kosma, jimi hendrix et miles davis avaient le projet de travailler ensemble, davis a fait une fusion avec le funk mais avait aussi repris le concerto d’aranjuez, le rap utilise du jazz depuis 20 ans, l’électro aussi notamment un très bel album de funki porcini…
    en revanche la pop et le jazz n’utilisent le classique que pour ses mélodies et sa science des arrangements, pas pour son approche la plus écrite qui en est constitutive.
    la musique contemporaine c’est encore différent (cf. la Messe pour le temps présent de Pierre Henry, avec notamment “psyché rock”)

    bref, plus j’avance dans ce comm et plus je pense que le classique n’avait pas vraiment sa place dans ce billet en effet ^^
    quant-au jazz il sert plus de contre-point, même si on aurait pu s’en dispenser :-)

  6. 6 Vaness on avril 5, 2010 13:57

    Moi aussi tous les ans, je m’amuse à regarder la nouvelle star (sans voter par contre, faut pas déconner !) et moi aussi tous les ans, je tiens même pas la moitié d’une minute à écouter l’album de la nouvelle recrue (peut-on parler de star finalement ?)
    Et tu mets le doigt sur le problème. C’est facile d’émerveiller les gens avec des chansons, des tubes, qui ont un vécu et qui ont, d’une manière ou d’une autre, marqués les esprits. (j’ai pas besoin de caméra ni de public pour le faire :p). les belles voix ne sont pas si rares et l’interprétation est quelque chose de délicat mais pas impossible !
    Et puis voilà, ça ne suit généralement pas derrière, des auteurs bancals, un univers trop différents de ce qui était chanté “sur les primes”…
    Bref, la nouvelle star, c’est un divertissement, un truc qui revient tous les ans et qui fait rire mais je ne crois pas que ce soit un moyen de découvrir de vrais nouveaux talents.
    De là à dire que la Nouvelle Star, ça sert à rien, il n’y a qu’un pas ;)

  7. 7 Christophe on avril 5, 2010 14:13

    Elvis ou les Beatles auraient-ils pu sortir du Ole whistle test ? m’étonnerait, m’étonnerait…

  8. 8 arbobo on avril 6, 2010 7:56

    vaste débat, vaness, de savoir si le divertissement ne sert “à rien ” ^^

    christophe, de toute façon les “crochets” en tout genre ne peuvent pas être le seul moyen de faire émerger des artistes, du moins espérons…

  9. 9 Anna on avril 6, 2010 9:13

    Mmarsu, au sujet du classique, tu peux aller lire cet article de Djac qui devrait te persuader que l’interprétation change quand même ‘achement de choses. :-)
    Moi aussi, je lui trouve un côté un peu trop bien léché, à l’album de C-J.

  10. 10 arbobo on avril 6, 2010 12:05

    un article lumineux, je plussoie anna

  11. 11 disso on avril 6, 2010 19:35

    Je n’ai pas écouté l’album, mais j’aime bien l’analyse que tu en as faite (qui curieusement d’ailleurs, me donne envie d’aller écouter le disque, du coup)
    Sinon, que dire, qu’un joli grain de voix ça n’est pas tout. Qu’à 17 ans, elle manque peut-être un peu de vécu. Et que, je suppose, comme tu le dis, on a bien dû aussi la faire rentrer dans les clous.
    Peut-être que le temps lui permettra de se révéler, c’est tout le mal que je lui souhaite (parce que bon, hein Soan…)

  12. 12 arbobo on avril 6, 2010 19:46

    tu me diras :-)

    parce que soan… pareil ^^

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