Bowie, comme beau, oui. We’re so turned on !
C’est comme lorsque la route touche au but, les vacances s’annoncent merveilleuse, la plage délicieuse, le voisinage sympa, la maison reposante et le programme réjouissant.
C’est seulement en quittant l’autoroute, en traversant ces pavillons sans personnalité que les premiers doutes t’assaillent. Mais tu ne sais pas encore pourquoi. Tu cherches une station de radio potable, tentative désespérée qui te fait tomber de Charybde en Scylla.
C’est la première fois que tu va dans sa maison de famille. Elle t’en parle avec tant de passion dans la voix, tu sens à l’entendre que le meilleur de sa jeunesse est là, dans cette bicoque que tu fantasmes avec elle dans l’espoir de partager un peu plus sa vie, son passé. Quand tu t’aperçois qu’elle n’a pas dit un mot depuis plusieurs minutes, tu es bien en peine de savoir combien.
C’est un peu ça qui t’inquiète. Tu viens de voir en roulant le bar qui va évidemment devenir ton QG de vacances… elle te dit d’une voix neutre qu’il a du être érigé depuis sa dernière venue. Elle évoque les virées épiques et drolatiques en optimist, tu embraies plein d’appétit pour le kyte surf que tu aperçois dans le soleil déclinant et auquel tu vas enfin t’initier pour te changer du catamaran.
La maison sans vrai jardin (où commence le sable, où le gazon?), tu n’en fais pas grand cas. Le gris du parpaing qui perce sous la mince couche de peinture délavée, peu importe. Elle court partout dans la maison, et porte déjà son chapeau de paille fétiche qu’avec sa soeur elles laissent scrupuleusement sur la même étagère à chaque départ. Comme le témoin de leur enfance, le changer de place romprait le sort.
Là où tu vois un matelas défoncé maladapté à la scoliose qui pourrit la vie vôtre aîné depuis des mois, elle voit les batailles de polochon avec des cousins qui ont même oublié de répondre à votre faire part de mariage.
Etienne Daho - Heathen retiré
A place to bury strangers - Suffragette city
Que faire? La main du courroux pousse dans ta poitrine le fer de la déception. La partie est serrée. Ton coeur aussi. Tu cherches dans la mer le salut de tes vacances. Les gosses ont pris leur seau et chaussé leurs “peaux de méduse”. Elle n’a pas quitté son chapeau pour enfiler ce deux-pièces sobre qui allume instantanément ton regard. La chasse aux coquillages est ouverte, couteaux, palourdes, coques, la tribu des chasseurs-cueilleurs-pêcheurs est lancée sur la plage. A défaut de souvenirs communs, on peut s’en créer de tout neufs. A deux pas de toi ça rigole en se jetant des paquets de vase, et tu reprends confiance, elle ne pouvait pas se tromper à ce point, tu la connais trop, elle te connait trop. Le couteau dessine des pétales dans la vase fraiche, tu l’aime un peu, beaucoup, oh oui tu l’aime bien plus que ça.
Pendant que les petits sont encore sous la douche, tu mets la main sur un trésor. Parmi l’énorme pile de 33 tours, de quoi reconstituer l’essentiel de la jeunesse de David Bowie. Et même plus. Dire qu’en voiture tu as passé ce disque de reprises du maître, celui avec la femme du président et aussi plein d’artistes que tu adores.
Il a fait tant de disques, bon sang!
Il en fait tant et il y a déjà eu tant de reprises. Celles-ci ne sont pas aussi copieuses que celles consacrées l’an passé à the Cure par le même label. Mais tu connais plus d’artistes, même tes enfants ont reconnu la voix suave de Keren Ann et celle d’Etienne Daho. Tu reconnais qu’ils s’en tirent franchement bien tous les deux, même si tu ne t’expliques pas de trouver autant de francophones sur cette compile américaine.
Vous êtes un peu cliché, comme couple. Tu lui a brandi le disque sous le nez en lui vantant la participation de A place to bury strangers. Elle n’a réagi qu’en mettant l’index sur le nom de Chairlift, et comme d’habitude elle avait raison, Caroline Polachek fait merveilleusement son Bowie tout en y apportant un côté Ariel Pink.
La pochette de Let’s dance part en lambeaux. Le nom de sa grande soeur est bien visible, inscrit au bic vert dans un grand coeur avec le prénom de Bowie. Elle aimera sûrement la version de We have band, il faudra penser à lui faire écouter. Pas de nom sur la pochette de Ziggy stardust, mais les titres sont cochés, soulignés, assortis de signes indiquant la préférence de son propriétaire. Une croix pour Sufragette city. Deux coeurs pour Ziggy stardust. La main de ton beau père? Ta belle mère? Le dernier concert auquel ils t’ont proposé d’aller était celui de Daho, ils ont eu du nez on dirait.
En voiture chanter fait oublier aux enfants leurs envies pressantes lorsque l’on vient de louper par mégarde l’aire d’autoroute. “Blouedjinnnnnnnnnnnnnnne”, c’est beaucoup plus marrant de chanter à tue-tête de mauvais morceaux surtout lorsque la reprise est incapable de la sublimer. Il n’y a rien à gâcher, autant ne pas se retenir. “ohoh absauloute béguineureze”, on n’entend pas vraiment le disque sous ce vacarme mais c’est sans doute mieux. Elle rigole en ayant un hoquet en deux temps (la vodka lui fait souvent ça), mais elle a raison, l’original ne valait pas mieux, c’était sans doute inutile d’aller lui faire une reprise.
Tu repenses à ton pote Arbobo, qui radote toujours les mêmes axiomes, comme quoi les meilleures reprises sont faites par les meilleurs songwriters. L’idée n’est pas idiote, mais alors il va absolument falloir dégoter les disques de Halloween swin team, ce qui ne sera pas facile au Super U du coin. Ca attendra le retour dans les terres civilisées du wi-fi. Après tout il a peut-être tort, c’est peut-être seulement que certains morceaux sont trop bien écrits pour pouvoir être gâchés, Edward Sharpe n’aurait alors aucun mérite a faire un beau Memory of a free festival.
Les mômes ne sont pas près d’aller au lit. C’est le premier soir, un peu comme si leurs vacances ne faisaient que débuter. Ils sautent sur un Fame méconnaissable, parfait pour cet exercice mais pas très mémorable. Arf, ton pote pourrait bien avoir raison sur ce coup là. Mais le miracle te sors de tes réflexions. Elle danse sur A place to bury strangers! J’adore cette chanson dit-elle, j’adore cette femme réponds-tu, mais en fait tu penses “j’adore ce groupe”. C’est toujours elle qui vient te lever de ta chaise pour danser le rock, et tu ne sais pas avec quels mots lui dire non.
Elles sont si belles ces vacances, c’est le premier jour mais elles sont si belles. Tout n’est peut-être pas perdu dans ce trou paumé. Pour peu que le diamant de la platine tienne le coup.
TweetWe’re so turned on, hommage à David Bowie publié par Manimal vinyl/Naïve. Sortie le 12 octobre.
tous les bénéfices seront reversés à l’ONG War child au profit des victimes de guerre
La version du commerce contient 42 titres en tout :-)
ah, belle prose…. mais je n’ai aucune envie d’écouter cet album…
le casting est pourtant pas si mal,
en fait Xavier il y a dans ce disque les avantages et les inconvénients du parti pris,
prendre le contre-pied d’un best of.
du coup, en dehors de zyggy stardust et ses faces b, disque le plus représenté,
il y a à la fois de grands absents (the man who sold the world, station to station),
et des disques qu’on n’attendait pas, Low, Lodger (mais aussi Tonight, sans doute le pire disque sorti par bowie).
bref c’est loin d’être parfait, mais il y a du très bon voire :-)
c’est à dire qu’Etienne Daho hein bon… quelle purge
ouais je sais c’est pas très rock’n'roll d’apprécier daho :-)
mais je suis pas très r’n'r de toute façon, doc ^^
la setlist panachée entre tubes et morceaux moins connus, ca fait partie des bonnes idées des albums de reprise, ca permet de (re)découvrir des titres.
C’est le casting qui ne m’attire guère, là encore un subtil panachage de stars du rocks indé et d’inconnus permet de faire de belles découvertes. je ne voit personne ici pour m’attirer…
chez manimal il y a toujours plein d’inconnus,
cf. l’hommage à Cure,
le Edward Sharpe est très bon, le vivian girls excellent, le We have band aussi,
et bien entendu le A place du bury strangers,
que j’ai mis en écoute en lieu et place du daho.
parce que je suis gentil avec les labels ^^_
et parce que le titre sera en téléchargement gratuit (mais je vous rappelle que les bénefs de ce disque vont à une ong, donc achetez le tout de même)
la version vinyl (+mp3) contiendra 42 titres,
l’édition CD n’en contient “que” 24 :-)
et le prix varie en conséquence, logiquement.
pour ceux que le prix n’effraiera pas trop (mais 42 titres, hein, n’oubliez pas)
le vinyl s’impose, on y trouve les magnifiques versions de Aquaserge (the supermen), de Caroline Weeks (Starman, incroyable), que des versions très personnelles, assez dingo, comme celle de amanda jo williams (the man who sold the world), st clair board (the secret life of Arabia)
bref, les vrais fans de bowie auront besoinde cette version complète, le sauf qualitatif entre le double cD et la complète vinyl-mp3 est assez énorme.
merci blake ^^
le Seu Jorge est un sans faute, c’est vrai, je doute qu’on fasse mieux.
Salut, peux-tu supprimer le message précédent en raison d’une erreur de pseudo mixée avec un partie d’adresse mail, (c’est n’importe quoi, je suis désolé !)
Mais le commentaire reste le même :
Bien que fan du Thin White Duke, comme à chaque reprise je ne suis guère convaincu, voilà une compilation-hommage que je vais - encore - hésiter à écouter. Très casse-gueule de reprendre Bowie ; j’aime beaucoup Daho, mais j’ai du mal à l’imaginer reprendre le très beau “Heathen/The Rays”.
Finalement, quelles sont les reprises dont on (je) me souviens ? The Man Who Sold The World, évidemment, de Nirvana, Ziggy Stardust de Bauhaus il y a des lustres, récemment j’ai entendu (chez Lenoir) un certain Eric McFadden reprendre très honorablement Ashes to Ashes.
Quoi d’autre ? Peut-être bien la plus belle relecture Bowienne figure-t-elle sur la B.O de la Vie Aquatique de Wes Anderson : entendre l’excellent Seu Jorge reprendre Quicksand, Changes, Starman ou surtout Life on Mars en version brésilienne avec une simple guitare acoustique est un vrai hommage original qui garde, de plus, la magie des chanson originales.
Sinon, superbe chronique très bien écrite et blog au diapason … :-)
Oh ! Je lis seulement aujourd’hui ce texte.
J’adore. Je pense que ça ne t’étonnera pas.
Malheureusement, tu ne dis pas grand chose du disque. Heureusement qu’il y a les commentaires. Je vais regarder de plus près ce qu’il y a dessus.
merci ska :-)
pas surpris en effet, ça me fait aussi du bien de revenir de temps à autre à une forme plus narrative ^^
ben ouais, c’est le privilège d’internet : pouvoir écrire “autrement”…
@blake
Par curiosité j’ai chercher ce Eric McFadden et effectivement belle interprétation et j’avoue que j’avais des doutes sur une reprise de Ashes to Ashes. Le clip est aussi sympa clin d’oeil sympathique : http://vimeo.com/22480541
Bon en tout cas ça me donne envie de partir en vacances musicales tout ça
Paul