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Anois : et l’Allemagne gagne toujours à la fin

En 1990, l’élégant et prolifique attaquant Lineker résuma le football : “c’est un sport qui se joue à 11 contre 11, et l’Allemagne gagne à la fin”.
En musique, sorti des labels d’abstract techo et des clubs berlinois, voilà une maxime qu’on se hasarde rarement à appliquer. C’est à peine si les amateurs de rock indé pensent à the Notwist lorsqu’on leur parle de ce pays.

Le duo Anois nous vient justement du nord de l’Allemagne, mais on n’en saura guère plus. Car ils n’en disent pas beaucoup sur eux et ne jouissent pas d’une publicité démentielle non plus.

On est entre deux familles musicales avec l’album Tree house whispers. On sent en arrière fond, très présente, une abstract techno centrée sur des ambiances et recourant volontiers aux bidouillages sonores. Mais le disque est tout de même largement acoustique. Les mélodies sont simples, ne cherchent pas l’esbrouffe. Les deux voix, souvent en choeur, chantent à la lisière du murmure, comme le font A weather.

Ce mélange réussi traverse de vertes prairies joyeuses (Beds and dishes), ou distille une mélancolie embrumée (Homecall, November), avec il faut bien dire un penchant plus affirmé pour la neurasthénie que les parties de saute-mouton. Mais la douceur l’emporte sur la déprime.
Anois semble composer à son rythme, s’interrompre pour laisser le regard s’évader par la fenêtre ou aller se promener dans les sous-bois. On se sent invité à partager un rapport au temps libéré, débarrassé de contraintes.

a noise

Lars et Anne associent bruitages, glockenspiel, trompette, guitares, piano, violon, sans virer à la démonstration de force ou au déballage de jouets post-noël. A la manière de Broadcast 2000 ou James Yull, Anois façonne des chansons où l’air circule, et qui peuvent nous accompagner à tout moment. Le chant peut rappeler aussi bien celui de Cocoon, ou certains titres de Patrick Watson, Anois a de ces voix chantées par le trou de la serrure sur des musiques qui repeignent librement sur les murs de la folk.

Le label Aerotone qui les héberge fonctionne sur un principe simple et participatif. On peut télécharger gratuitement sans avoir de comptes à rendre, au taux élevé de 320 kbp/s. Ou bien on commande, contre paiement, les CDs correspondants. Une formule ouverte, qui reste dans une logique de “musique libre” sans refuser pour autant l’argent des auditeurs.
Croyez bien que c’est sans snobisme que j’ai choisi de vous parler d’Anois plutôt que de la dernière livraison du label, un duo français, Ödland, un peu trop arty à mon goût. Mais je vous invite tout de même à explorer ce catalogue encore jeune mais bien rempli. Aerotone joue pleinement son rôle de label en ayant une ligne artistique et en ne sélectionnant que des groupes qui valent vraiment le coup d’être écoutés (notamment Cantaloup).

Le seul reproche qu’on pourra faire à Tree house whispers est sa (très) relative longueur. En descendant en dessous de 13 titres, on aurait évité de sentir une redondance entre certains titres, et l’on serait sorti de l’album totalement impressionné.
C’est tout de même une bien belle découverte, qu’on aimerait voir sur scène et dont on espère qu’ils nous régaleront d’autres morceaux.

PS : G.T. a lancé un appel à articles sur les musiques libres méritant notre attention.